Résultat de recherche d'images pour "maison de la paix genève"Une réunion intéressante sur un thème, ô combien d’actualité, s’est tenue ce 28 janvier à Genève. Organisée par le IHEID en collaboration avec Avenir Suisse et Foraus, cette « Dispute(s) de la Maison de la Paix » portait sur « Les défis de la démocratie suisse».

 

Les amis de cette page liront avec intérêt que les deux professeurs honoraires invités, Hanspeter Kriesi (sciences politiques) et Andreas Auer (droit constitutionnel) ont souligné l’importance d’accorder des droits politiques aux étrangers domiciliés en Suisse.

 

Le professeur Kriesi, après avoir passé en revue les différents défis auxquels est confronté la démocratie suisse (tyrannie de la majorité,  tyrannie des citoyens, le cens caché, inégalité des ressources et manque de transparence dans les campagnes politiques, manipulation par les élites, érosion des compétences étatiques, manque de temps, surcharge des citoyens) a présenté des pistes pour lui donner un souffle nouveau.

 

Première proposition : ouvrir la démocratie suisse au monde, premièrement en incluant dans le corps électoral suisse l’ensemble des résidents, y compris donc les étrangers. Ceci prend tout son sens dans des cantons à forte concentration d’étrangers comme Genève (env. 40%) ou dans des communes où leur nombre dépasse les 50% (Renens/VD ou Kreuzlingen/TG). Ensuite, promouvoir la démocratie Suisse au sein de l’Europe et de ses institutions, en participant au projet européen.

 

D’autres suggestions pour redonner un nouveau souffle à la démocratie suisse: garantir un débat fourni entre toutes les forces politiques (rôle des médias et du service public), garantir      que les résultats des votations puissent être revus par la suite (faciliter la possibilité de revoter sur un objet), augmenter la compétence et la motivation des citoyens (mots clé : instruction civique et utilisation des nouvelles technologies), démocratiser la vie quotidienne (promouvoir la démocratie small-scale ou de proximité, notamment dans la famille, l’école, le système de santé, etc.. Et pourquoi ne pas revoter sur la « cogestion » ?)

 

Le professeur Auer a résumé les défis et proposé des améliorations en se limitant à la démocratie politique (excluant donc la démocratie dans la famille, économie, associations, etc.).  Au sens politique, la démocratie présente selon Auer, trois dimensions : d’un coté les institutions (initiative, référendum, etc.) ; de l’autre, la société civile (organisations sociales et non directement politiques). La troisième dimension est idéologique (la démocratie doit être perçue comme positive. Cela n’a pas toujours été le cas dans l’histoire).

 

Les trois dimensions sont confrontées à des défis. Pour Auer, le premier et principal défi auquel fait face la dimension institutionnelle est l’absence (les limitations) des droits politiques des étrangers établis en Suisse. Ceci est d’autant plus problématique en Suisse. Selon Andreas Auer exclure les étrangers du corps électoral titille les fondations mêmes de la démocratie suisse, qui est basée sur le principe que l’on doit pouvoir voter sur les lois qui s’appliquent à nous.

 

Actuellement, la démocratie directe empêche ce développement démocratique souhaitable, à l’image de nombreuses votations récentes, cantonales, sur le droit de vote des étrangers (refusées), ou fédérales et cantonales ayant abouti à un durcissement des conditions de naturalisation.

 

D’autres défis au niveau institutionnel et social incluent le respect des droits de l’homme par les initiatives populaires, la fragilisation des médias dits traditionnels et les problèmes identifiés dans les médias sociaux (notamment l’absence de débat et le filtrage d’informations laissant passer que celles qui réconfortent l’opinion de la personne) ou la désaffectation des partis politiques. Au niveau idéologique, il est problématique d’assister au dénigrement systématique des institutions en place et à l’intégrisme démocratique (ou populisme).

 

Les deux professeurs se sont cependant montrés optimistes sur les capacités de la démocratie directe suisse à faire face à ces défis et à se renouveler. C’est sur cette note optimiste que s’est conclu également le court métrage réalisé par Charles Kleber « La démocratie suisse à l’épreuve de la mondialisation », lequel, pour le reste, dresse un portrait assez préoccupant de l’état de la démocratie dans le monde : la Suisse doit (et peut) donner un souffle nouveau à sa démocratie, la faire vivre plus intensément dans la cité.